Billet d'humeur août 2011 (1)

LES HISTOIRES DE FAMILLE DE LA COUSINE ANNETTE

Je voudrais ici remercier la cousine Annette pour les différents récits qu’elle nous conte concernant la vie de Paul Splingaerd, de sa femme et de leur famille. Annette a été très ‘réactive’ avec moi, le webmestre, à cause de certaines oppositions réciproques. Elle nous a alors donné le principal des histoires qu’elle connaissait par tradition, spécialement venant de sa mère, Hortense Splingaerd, qui les tenait de sa mère Anne Colette Zhang. Malheureusement, Anne Colette n’a pratiquement pas connu Paul Splingaerd et elle n’a été elle-même qu’un intermédiaire indirect des histoires de la vie de Paul Splingaerd. On ne sera donc pas étonné d'une déformation en cascade de l'information.

FAMILY STORIES OF THE COUSIN ANNETTE

I would like to thank Annette's cousin for the different stories she tells us about the life of Paul Splingaerd, his wife and family. Annette has been 'reactive' with me, the webmaster, because of some mutual oppositions. She then gave the main stories that she knew by tradition, especially from her mother, Hortense Splingaerd, who was also from her mother Anne Colette Zhang. Unfortunately, Anne Colette hardly knew Paul Splingaerd and was herself an indirect means of stories of the life of Paul Splingaerd. It will not be surprised to deformation cascade of information.

 

La cousine Annette n’a pas toujours raconté les histoires de famille de manière structurée. Il faut que je retourne assez loin dans le temps pour en faire le résumé. Lorsque les éléments qu’elle apporte se présentent de manière narrative, je préfère proposer son texte qui est toujours en anglais.

  • Pour elle, l’élément le plus important est la relation entre le pont et la famille Splingaerd. “the Bridge is the most important event in the history of our Gt-grandfather Paul” .
    Au début des entretiens, Annette ne savait pas de quel pont il s’agissait ni de quelle ville. Elle disait simplement que Paul Splingaerd avait construit un pont et que son fils avait continué. Ultérieurement, nous avons appris qu’il s’agissait du Pont Sun Yat Sen de Lanzhou. Cette ville est la capitale de la province du Gansu, en Chine. Cette histoire de famille et cette tradition a été un puissant moteur pour les invitations des membres de la famille à Lanzhou lors des célébrations du centième anniversaire du pont. Cette histoire a donné lieu à des discussions homériques car elle a été l’objet de critiques et a mis en avant des éléments contradictoires comme de signaler que Paul étant décédé en 1906 et le pont construit en 1909, il excluait l’aïeul de sa construction. Quant à la participation d’Alphonse à cette construction, elle n’a jamais été démontrée. Les annonces qui ont été faites dans la presse chinoise sont un hoax.
  • Chacun son opinion mais je ne pense pas que le pont fut l’évènement le plus important de la vie de Paul Splingaerd. La rencontre avec Verbist ou avec Catherine, par exemple, me semble plus importante.
  • L’autre élément intéressant donné par Annette est de relater que Paul Splingaerd avait préconisé la construction de ce pont en vue de sauver des vies humaines. Cet élément a été souvent mis en avant par Annette, avec insistance sans doute pour faire ressortir les qualités humaines de Paul Splingaerd et son altruisme. Mais c’est très spéculatif de la part de la cousine vu qu’il paraît évident qu’il existe de nombreux facteurs qui déterminent les autorités à construire un ouvrage d’art aussi important. L'aspect économique est primordial vu la situation géographique de la capitale du Gansu. En outre, ce sont les Chinois qui nous ont appris que le projet de construction d'un pont définitif était déjà envisagé depuis plus de trente ans et la problématique de ce pont se posait depuis plusieurs centaines d'années. Dans ces conditions, Splingaerd n'a rien inventé de neuf. Mais on ne peut exclure qu'il ait été un élément moteur pour la réalisation définitive sous l'autorité de Peng Yingjia et surtout du nouveau gouverneur Shen Yun (1905).
  • Annette nous parle de la famille de Catherine, l’arrière-grand-mère, que Paul Splingaerd a épousée en 1873:
    “Her father was not very rich but fairly well off for his time. Catherine's mother passed away when she was very young”.
    “Her dad remarried and her stepmother treated her unkindly. Her mentors were the nuns and later she drew close to God. She later decided to devote her life as a nun. She was studying to be a novitiate nun when........At the same time Paul our Gt-grandpa also was contemplating to be a Priest, his mentors were the Priest from the Scheurt Mission, he expressed his wish and the Priests evaluated his disposition as being a very jolly and a person full of jokes...... not a Priestly quality, they all recommended that Paul should be married and have a family of his own. The Priest found Catherine a very intelligent lady and a God-loving person, they found the best wife for Paul, they both had the same Spiritual qualities and they matched very well. Their love for each other grew and had many children. Speaking about daughters, there were 8 of them! Catherine, constantly related to them her youthful wish of Godly devotion, in time her words sank into 4 daughter's hearts, they readily agreed to fulfill their mother's desire and all 4 devoted their lives as nuns!”
    “Spae was a Scheut Mission Priest, he spoke highly of Paul loving his wife and his children throughout his book, also, Paul even looked after illegitimate kids of other Chinese officials who were deposed and also those of foreign officials. I am not in cognition of their names, but I am aware of their nationalities.”
    En ce qui concerne l’origine de Catherine Li et sa famille, il est temps de se poser la question de la véracité historique de la situation de Catherine. Effectivement, le Père Spae nous donne une autre version édulcorée de cette situation et qui est pratiquement l’inverse. Mais nous n’avons aucune précision de ce que Spae déclare. Aujourd’hui, j’aurais plutôt tendance à penser que la version d’Annette s’approche davantage de la vérité car elle nous donne sa référence (sa mère et sa grand-mère) alors que Spae ne nous donne rien que les notes de Rutten. Encore que je me demande comment une jeune fille puisse ainsi s’échapper de son milieu familial et se retrouver chez les missionnaires sans avoir l’approbation de sa famille, ce que semble dire Madeleine, la soeur d'Hortense (à lire dans le prochain Billet d'Humeur). Il y a plusieurs conclusions que l’on puisse tirer de ces différentes situations de la vie de jeune fille de Catherine dont la première est sans doute qu’elle s’est vite rapprochée de Paul par son intelligence, sa volonté de construire une famille et d’assurer sa position sociale ; ils avaient tous les deux vécus une enfance et une adolescence difficile. On n’en parle guère dans la littérature, mais il semble que la femme d’un mandarin important avait un rôle social à tenir. Il faut se rappeller cette photo où l’on voit Paul et Catherine présider une assemblée de chrétiens (San Cheng Kong ca 1890) et où elle se tient aux côtés de son époux. Cette photographie compte plus que de longs discours. En outre, il faut également se rappeller que Catherine et ses filles aînées s’occupaient de la « Clinique de Lanzhou » pour soulager « pro Deo » la misère et les maux des petites gens.
  • Cette façon de voir les choses nous ramène au nom de Catherine et pourquoi elle aurait été appelée Tchao. Nous ignorons pourquoi ce Tchao a été évoqué. Rutten dit clairement que le nom de Catherine était Li et non Tchao.(Kadoc, A.IV.b.4.3) : «  Mad Splingaerd (Catherine) était née Li et non pas Tchao. Tchao est le nom du beau-père, sa mère s’étant remariée (du Heoupa, disait Thomas Tchao) » – il semble que cette localité est en Mongolie. On ne sait plus exactement si Catherine avait deux mères et un père ou deux pères et une mère. Nous n’en savons pas plus pour l’instant sauf ce que Annette nous dit. Espérons que l’inscription chinoise qui se trouve sur la tombe de Catherine nous donnera quelques explications supplémentaires. En attendant, nous avons trouvé sur un site chinois que Catherine était 姓赵,名为加达林 , Chao, nommée Jia Dalin.
  • Annette signale encore, en aparté, que Paul avait des ennemis parmi les Belges de Lanzhou et qu’ils étaient jaloux de lui. Nous ignorons s’il s’agit d’un élément spéculatif ou si cette déclaration vient de la tradition. Du temps de Paul, il n’y avait pas de Belges à Lanzhou, à notre connaissance sauf les militaires que nous connaissons. Je pense que "les ennemis" dont parle Annette sont bien les militaires de la seconde mission Fivé travaillant pour l'E.I.C.
  • Il existe une problématique dans ce que nous conte Annette. Il est difficile de discriminer ce que la tradition lui a donné et les éléments qui ressortent de son analyse, de sa foi, de son opinion actuelle. C’est ce que j’appelle les éléments spéculatifs. Elle mêle les historiettes familiales avec des discussions et des polémiques. Elle ne nous dit pas stricto sensu : « Voilà ce que ma mère me racontait ». Cela complique et ne facilite pas l’analyse. En outre, depuis cinq ans, elle a reçu de nouvelles informations qui se mêlent avec celles de sa jeunesse.
    Au milieu de ses textes, elle insiste pour nous faire croire que son Paul Splingaerd serait resté vierge (puceau) jusque l’âge de 31 ans. On ne voit pas très bien pourquoi elle insiste tellement puisque il est bien normal qu’un jeune homme est totalement libre de sa vie amoureuse et de sa sexualité avant qu’il ne se marie. Puceau ou pas puceau, nous n’en saurons jamais rien. C’est une discussion stérile. Voir également sur le Billet d'Humeur suivant.
    Il y aura bientôt 110 ans qu’il est mort, on pourrait regarder les choses avec un peu plus d’objectivité et de sérénité. Savoir s’il était puceau, s’il a eu des enfants naturels, etc. ne terni pas sa réputation ni ses qualités humaines historiques. Il convient de ne pas négliger de s’intégrer à la mentalité des européens de cette époque imprégnée du libertinage endémique de la bourgeoisie du dix-neuvième siècle, particulièrement dans les colonies.
  • Par bonheur, Annette nous conte encore d’autres histoires fortes intéressantes. Par exemple, que Paul Splingaerd était un fonctionnaire important à la Cour de Lanzhou. C’est un élément déterminant car il y avait à la Cour de Lanzhou des milliers de fonctionnaires sans emploi. Les textes que nous avons retenus des religieux et des militaires ont plutôt tendance à nous montrer Paul Splingaerd comme étant un personnage plutôt serviable, voire servile, toujours à la merci des prêtres ou des militaires. Ceux-ci nous présentent Splingaerd comme étant un homme de forte influence mais jamais comme étant un homme de pouvoir ou comme un homme qui commandait. Un mandarin chinois, même avec un bouton rubis n'a aucun pouvoir; ce n'est qu'un fonctionnaire et il n'a les pouvoirs qu'en fonction de sa mission, si cette mission lui donne du pouvoir. Ce que nous retenons de Paul Splingaerd reste un peu ambigu. C’est tout l’intérêt des histoires des familles qui permettent de réajuster les aspects réels de l’histoire des « anciens » tout en retenant que ces histoires ont été spontanément déformées et amplifiées, voire magnifiées. Ton Brulin , qui a connu le Père Spae, m’a dit qu’il avait l’impression que les prêtres et Spae lui-même n’avaient pas tout dit pour « faire plaisir à la famille ». Toujours à l’affût des informations, j’ai tendance à croire que la littérature des prêtres fut volontairement expurgée. Nous ne saurons jamais de quoi elle aurait été expurgée, en tout cas via leurs écrits. C’est la raison pour laquelle Anne Splingaerd et moi nous sommes en train d’étudier la correspondance autographe de Paul ; elle comporte une vingtaine de lettres qui vont nous permettre de revoir la personnalité et la mentalité de l’ancêtre sous un jour nouveau. Mais on ne peut pas s’attendre à ce que ces lettres nous révèlent la façon dont Paul vivait.
  • Annette nous dit également que Paul Splingaerd voulait devenir prêtre. Si on lui a dit lorsqu’elle était jeune, nous en prenons bonne note ; si elle le pense, c’est autre chose car elle marque une opinion. Ce n’est pas mon impression. Sinon, il serait resté avec les prêtres. Or, dès que Verbist fut mort, il a quitté la mission de Ziwandzé. Dire qu’il voulait devenir prêtre est purement spéculatif et ne reflète qu’une impression. Paul n’a jamais été en condition pour devenir prêtre à cause de son manque d’instruction ; il pouvait tout au plus devenir ‘frère’.
  • Il n'est pas parti en Chine pour devenir "frère" ou prêtre, il est parti en Chine pour saisir une opportunité car il avait l'esprit aventureux. Annette nous dit également : ” If the Bridge story was proven true ” en parlant de ce que les autorités de Lanzhou ont déclaré en 2009 ne signifie malheureusement rien car lesdites autorités n’ont pas non plus déterminé le rôle exacte de Paul ou d’Alphonse dans l’affaire du pont. Mais nous espérons toujours des informations à ce sujet venant des Chinois et nous pouvons être satisfaits qu’ils aient reconnu que les Splingaerd ont eu une forte activité dans le développement de la ville avant la révolution de 1911.
  • Ci-après un autre élément intéressant :
    “Paul Splingaerd was advisor to the Chinese Court, very simple, Paul was made a Mandarin Judge because he could speak many languages. The area where the court was located was close to Xin Jiang Chinese Turkishstan, also the Mongolians and Russians were in and out as tradesmen, constantly there were disputes which Paul Splingaerd who not only understood their languages but could speak to them as a Judge. Therefore, the cases involved he had to advise the Chinese Court. The Chinese officials were not envious of Paul, because none of them could hold his position, they could not speak any foreign language, instead they looked up to him and liked him a lot”.
    Ce que dit Annette ici semble correct concernant ses rapports avec les chinois de la Cour et Paul Splingaerd le dit lui-même dans sa lettre du 16 octobre 1904 (from Lanzhou): "Alle de ander mandarijnen zijn goed met mij en zouden maer willen dat het zou geluken van in gang te komen wat ik voor heb wegens mijnen etc., nu zou ik niemand anders met mij moeten hebben als eenen chimist om kleine verzoeken te doen wat hier in de mijnen gevonden ". Ce qui voudrait dire approximativement: " Tous les mandarins ont bons avec moi etvoudraient que ce serait bien dans le mouvement pour obtenir ce que j'ai fait[concernant] les mines, etc. Maintenant je n'ai personne d'autre avec moi comme un chimiste pour demander quoi faire ici avec les mines trouvées". C'est dans cette lettre que Paul nous parle de ses rhumatismes, du Gouverneur (celui qui a précédé Shen Yun), qui n'était pas pro-occidental et qu'il appelle "aimable homme" (houden men). C'était Wei ta-jen.
  • Autre thème intéressant abordé par Annette:
    “There was a Chinese official who was removed from, all his belongings were confiscated and was penniless. He knew how kind Paul Splingaerd was and gave his son to him, knowing he will be well cared for. True to the fact, Gt- office grandfather Paul gave him a good education and this young boy grew up with our grandfather Alphonse, Remy and John.”
    Il s’agit ici d’un élément intéressant également et il y a tout lieu de croire que ce fut vrai et que Stanislas Splingaerd-Lin est resté avec la famille de très nombreuses années ; il ne s’est séparé des enfants Splingaerd que lorsqu’ils furent placés à Shanghai (1896) pour y recevoir une éducation européenne à laquelle il ne semblait pas avoir droit. Je suppose qu’il est resté avec Catherine avec qui il était sans doute à Shanghai à cette période et qu’il est resté à son service lorsqu’elle est partie à Tientsin. Pourquoi Tientsin plutôt que Pékin ? On peut supposer que la résidence de Paul à cette époque était Tientsin car il était employé aux Mines de Kaiping qui se trouvent non loin de Tientsin (au Sud). Mais il y a tout lieu de penser que dans les huit années qui ont suivi, Paul, Catherine et les trois plus jeunes enfants Splingaerd ne se sont jamais stabilisés dans une ville. Nous ne pouvons savoir ce que Stanislas faisait à cette époque faute de renseignements à ce sujet et Paul, dans sa correspondance des dernières années, ne parle jamais de son premier fils adoptif. Voir également plus loin.
  • Encore un theme recurrent:
    “In the years 1948-1949, Louise's dad our Uncle Francois visited my Mom and Dad in Shanghai ( Washington Apartments #62). He knew this young man who used Lin as his last name. Even Uncle Francois was baffled as to why he was doing so. I do not know the name of this man, but there was only one person that did use the last name LIN, and he treated his wife badly. She was a very nice lady Uncle Francois told my parents, he knew of them. I can hereby say, that Paul Splingaerd did not ever have an illegitimate child, but, he did help to look after some kids from foreigners of high ranks. Later, their fathers took them back home to various countries.
    Ici, il est peut-être intéressant de noter que François, étant le plus jeune enfant d’Alphonse, a probablement bien connu Stanislas Lin-Splingaerd (Lin Gui Sheng) qui habitait dans les dépendances de la grande maison d’Alphonse à Tientsin. Il a donc bien connu « oncle Stanislas ». Mais François nous dit également qu’il connaissait une autre famille Lin dont un enfant était devenu prêtre avant de se marier et de partir à Taiwan alors qu’il devait devenir évêque. Il s’agit de Lin Yin-Qing. Ces deux familles ne sont pas de la même filiation et viennent de deux adoptions différentes.
  • Annette nous disait déjà le 4 août 2009
    “The Bridge project was initiated by Paul Splingaerd before 1906, his travel to Brussels to see King Leopold II had much to do with this Bridge building, his disappointment caused his failing health and death. My mother knew a lot about this Bridge, the Zhang family and many others details, for she had Rheumatic fever for one whole year and stayed home from school, this gave ample time for grandma to tell her events to keep her spirits up. Grandma also shared details as to the night when grandpa received the telegraph that his father sent saying he is on his death bed. It was middnight! Grandpa rode on horseback from Peking to Sian Fu, Gt-grandfather was waiting for him and told him about the Bridge building and many unfinished businesses.
    Cette histoire est vraiment intéressante telle qu’elle est racontée et rejoint la légende. Hortense, en 1906 n’était pas encore née (°1909). Elle n’a pas pu apprécier elle-même les évènements qui ne sont venus à elle que par sa mère Anne Colette, comme Annette nous le racontera plus loin.
  • «…. the contracts in Chinese which the Belgium Embassy obtained from the Lanzhou Archivist [……]. All these contracts had to be re-written in Alphonse Splingaerd's name, and he was in charge to get the Belgian engineers and equipments as well as to house the engineers too. Therefore, I can safely say, the Bridge is by Paul Splingaerd. Even after his death his project was carried out by his son, but, the initiator was still Paul Splingaerd. Whenever you will start writing about this Bridge, I will furnish you with why the Belgium government was not involved.”
    Nous avons la preuve aujourd’hui qu’Alphonse Splingaerd a joué un rôle très important à la Cour de Lanzhou et qu’il possédait un contrat (1909) avec le gouvernement du Gansou qui lui donnait une prérogative concernant les affaires belges ; il dépendait du bureau des Affaires étrangères dirigée à cette époque par le vice-roi Peng Yingjia. Ainsi, il a représenté ce gouvernement vis-à-vis de Jean Jacques Muller et de tous les autres Belges qui vinrent à Lanzhou pour remettre la fabrique de draps en service, créer une savonnerie et une fabrique de chandelles, etc. C’est Alphonse qui commandait les machines, engageait le personnel, etc. En fait ,c'est exactement ce que faisait son père. Mais il n’existe aucun document d’époque qui indique qu’il se soit occupé du pont en construction entre 1908-1909 car c’était l’affaire des Allemands. On a d’ailleurs appelé longtemps ce pont « le pont des Allemands » dans le langage populaire. Et en ce qui concerne les affaires qu'il avait reprises de son père, le conseiller Lin A De ne semble pas avoir réussi pour ce qui concerne les mines et le pétrole, d'après un document chinois récent qui traite du pétrole du Yumen. C'est sans doute lui qui parvint à faire venir Albert De Deken dans le Gansu. Il était qualifié en 1911 de "ingénieur en chef des Mines et Usines Métallurgiques de Son Excellence le vice-roi du Kansu à Jao-Kai". Albert De Deken était connu de Paul SPlingaerd et ils avaient eu de la correspondance, comme avec Robert Geerts que Lin Fuchen connaissait sans doute depuis plus longtemps.
  • D’autre part, il est tout de même étrange que ni les Scheuts, ni Paul Splingaerd dans sa correspondance ne parlent jamais du projet du pont en ce qui concerne son voyage en Belgique. Il y a encore beaucoup de travail à ce sujet-là.
    Quant à savoir si le pont peut sauver des vies humaines, cela reste à démontrer. J’ai vu dernièrement un reportage bizarre sur un Chinois pêcheur de cadavres. Il est installé en aval du pont Sun Yat Sen à Lanzhou et il ‘exploite’ plusieurs petites criques du Fleuve Jaune. Il récupère environ 200 cadavres par an, essaye de les identifier, place des annonces et revend les corps aux familles. La plupart des cadavres sont des suicidés, avec une majorité de femmes. Comme le pont est piétonnier, c’est devenu un endroit privilégié pour ces gens désespérés. Le pont ne fait pas que des heureux ! Mais Paul Splingaerd, en 1900, ne pouvait prévoir cette situation.
  • “Another very important clarification of Paul Splingaerd's name, Re: To Stanislas Lin, he is not the out of wedlock son of Paul Splingaerd as some insinuated! Paul Splingaerd loved his wife and was faithful to her! Stanislas was the son of a Mandarin Official who was disgraced and became very poor, he sold his son Stanislas to Paul and Cathrine who were well known for their benevolent characters. Together, they raised him with their sons and even gave him a good education. Louise's father, uncle Francois knew him well years ago he told us that Stanislas went on the wrong path”.
    Voir l’article 8 ci-avant. Rutten vers 1945 (KUL – Archives Kadoc A IV b 4 3) disait sensiblement la même chose. Mais il ne précise pas que Stanislas fut sur un mauvais chemin. Cette omission des choses négatives est caractéristique des relations que les Scheuts ont toujours faites des évènements dans leur correspondance.
  • Annette écrivait également le June 2, 2010 à son cousin Alan :
    “I have mentioned in the past that Gt-grand-father died of disappointment which led to his demise. He went to Belgium to see the King for the Bridge……”.
    Il n’est pas exclu que Paul Splingaerd soit venu en Belgique dans l’espoir de trouver des solutions pour la construction d’un pont à Lanzhou. Mais il n’est certainement pas venu en Belgique uniquement pour cela, c’est évident. Ce qu’il a voulu faire, c’est de revenir au pays natal avant de mourir car il a entrepris ce voyage en étant déjà sévèrement malade. Il voulait revoir ses amis, comme la famille du comte d'Ursel qui était mort depuis, les descendants des famills de Ottenburg, Alfred Blondel à Tournai, son ami Scheutiste le Père Verlinden, etc.trouver des techniciens pour ses projets et emmener avec lui Robert Geerts qui habitait Louvain, malgré le désaccord du vice-roi. D’après la presse belge, il semblerait qu’il ait annoncé son désir de voir le roi ; mais ce n’était certainement pas pour lui parler du pont. Que voulez-vous que Léopold II fasse avec un pont ? Il faut sortir de l’illusion et de la déformation des faits. Ou alors, il faut imaginer que Paul Splingaerd se faisait de sérieuses illusions. Ce n’est pas parce que Paul Splingaerd ne fut pas reçu par le roi qu’il est mort, évidemment. Paul est mort après son voyage parce qu’il était malade. Mais il doit être vrai que le fait de ne pas avoir eu beaucoup de succès lors de ce voyage a affecté son moral et sa psychologie et l’on sait combien c’est important. Non, ce qui a tué Paul Splingaerd, c’est le voyage lui-même, avec ses fatigues, ses tracas et l’effort physique demandé. Déjà, avant de partir, il ne se déplaçait plus qu’en palanquin à cause de ses rhumatismes, et sa fille nous dit qu’il avait beaucoup maigri et il était atteint d'un sérieux diabète qui ne se guérissait pas à son époque. Lors de son voyage à Lourdes, il devait être aidé par le prêtre qui l’accompagnait pour pouvoir monter dans le train, etc.
  • « After doing a lot for the Belgian Government he was denied an appointment with King Leopold II. Because, two of the King's men wrote bad of Paul to the King and H.M. believed them. These two men wanted a very high price for this Bridge, while our GT-grandfather and the Lanzhou then Government did not like the idea. That was why in J. Spae's book he wrote that these two men wanted to seize the Bridge. They did not win, for the then Lanzhou Government refused to negotiate with them personally without Paul Splingaerd involved!”.
    Cette partie des réflexions de la cousine Annette est également très intéressante et ce paragraphe se décompose en plusieurs parties. “ After doing a lot for the Belgian Government he was denied an appointment with King Leopold II”. Sur cette partie, il y a effectivement un gros problème car Paul Splingaerd, contrairement à ce que la cousine pense, n’a jamais beaucoup travaillé pour la Belgique ou le gouvernement belge. Il ne faut pas confondre. Paul Splingaerd à travaillé comme commissaire (free lance sous contrat) pour le compte de l’E.I.C. (Etat indépendant du Congo), il n’a peut-être travaillé pour la Belgique que dans le cadre de sa nomination comme commissaire (voir son passeport) lors de sa mission destinée à déterminer les indemnités dans la période post-boxers. Sa célèbre intervention auprès de Li Hongzhang avec le comte d'Ursel pour les contrats destinés aux concessions pour le railway Pékin-Hankéou est de la même sphère: d'Ursel était un représentant de l'E.I.C et non de la Belgique. Il aimait certes la Belgique et le roi, mais il y avait certainement confusion. En outre, disons que le roi disposait de centaines d’agents en Afrique et de plusieurs dizaines en Chine et il n’était pas tenu de recevoir personnellement tous ces fonctionnaires. Il avait d’autres choses à penser. En 1906, il était devenu vieux, il n’était presque jamais à Bruxelles, était à Ostende ou en France au Cap Ferrat plusieurs mois par an ; il est tout à fait possible que Léopold n'était pas en Belgique pendant le court moment de la présence de Paul dans son pays natal. D'autre part, il faut se rappeler que le roi subissait une pression internationale pour avoir pillé le bassin du Congo, était devenu l’homme le plus riche d’Europe et possédait des territoires plusieurs fois plus grand que la province du Gansu, en Chine. Ce n’est pas avec un tel personnage qu’il faut discuter de la construction d’un pont. Si Paul pensait cela, il s’est trompé et il a été bien naïf. Mais à mon avis, Splingaerd ne s’est pas trompé et s’il voulait voir le roi, c’est parce qu’il souhaitait son appuis auprès des industriels belges et lui faire découvrir les possibilités économiques qui se présentaient au Gansu. Nous n’avons aucun document qui prouve qu’il ait tenté réellement de voir le roi, s’il a fait des démarches, s’il a écrit, etc. Rien. Voir également le point 22 ci-après.
  • En ce qui concerne la seconde partie du texte d’Annette, le deux personnages dont elle fait allusion sont le colonel Gaspard-Edouart Fivé (1849-1909) et le lieutenant Joseph Ledent ou Lambert. Paul ne s’entendait pas particulièrement bien avec eux (sauf avec Lambert) et avait de grosses différences d’opinion sur certaines questions dont la principale était leur méconnaissance de la mentalité des Chinois avec qui il fallait négocier très lentement. Il préconisait le festina lente. Or, les Belges étaient pressés, n’eurent pas de succès dans leur dernière mission et retournèrent à Bruxelles pour déposer un rapport qui semble ne pas avoir été favorable à Splingaerd. C’est en tout cas ce que tout le monde dit aujourd’hui. Mais il n’existe aucuns documents, lettres ou rapports qui nous signifient que les choses se sont passées comme cela. Mais cette situation n’est pas exclue et je veux bien y croire. Le colonel Fivé était une sommité dans le monde des coloniaux et il était connu personnellement du Roi, voire un familier. Il était président de la Fédération des cercles coloniaux. C'est tout dire. Quant à Paul, il était devenu irritable, avait changé de caractère et était devenu plus indépendant de ses mentors qu’il n’avait jamais été pendant toute sa vie. Je ne lui donne pas tord. Dire que les officiers voulaient un prix très élevé pour ce pont, que les Chinois et Splingaerd n’étaient pas d’accord, relève de la plus pure hypothèse mais c’est intéressant de l’avoir signalé. Dans la réalité, les officiers belges n’étaient pas dans le Gansu en vue de réaliser des opérations commerciales ou pour y faire de la promotion. Ils y étaient pour étudier les terrains, ses ressources et les possibilités de leur exploitation. C’était l’ordre du roi. Mais ils sont sans doute tombés sur les mêmes conclusions que le Commandant Wittamer quelques années plus tôt, à savoir que les ressources du Gansu ne seraient pas exploitables tant qu’il n’y aurait pas une meilleure infrastructure de transport. Et pour citer Koen De Ridder, je dirai comme lui que Splingaerd et les Scheuts auraient très bien pu faire ce travail eux-mêmes et en arriver aux mêmes conclusions. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il devenait impératif de contruire un pont et d'essayer de rendre navigable le Fleuve Jaune.
  • Dans la même lettre, Annette nous dit encore :
    “Many thought that building the Bridge was for MONEY! WRONG! The proof is, the Splingaerd family did not get a penny in payment!”.
    Soyons prudent: il y a quelques années, je disais déjà que l’on ne pouvait construire un ouvrage aussi important que le pont de Lanzhou dans le but unique de sauver des vies humaines. Je n’ai jamais parlé d’argent ! J’ai évoqué uniquement le contexte socio-économique. Il y a confusion. C’est évident que la famille Splingaerd n’a jamais reçu d’argent pour cette affaire de pont d’autant plus que les Splingaerd n’y ont jamais été impliqués. Sinon, cela reste à prouver et les histoires de famille, souvent contradictoires, ne sont pas suffisantes dans ce cas.
  • Concernant le paragraphe où il est question de Léopold II, pour ceux que cela intéresse.
    A l'époque de Paul Splingaerd, l'Etat Belge n'avait rien à voir avec l'Etat indépendant du Congo. Mais il se fait que Léopold de Saxe-Cobourg Gotha était à la foi roi constutitionnel et héréditaire de la Belgique et Souverain de l'E.I.C. (Etat Indépendant du Congo).Cette situation conduisait beaucoup de gens, même à l'époque, à la confusion. Cette confusion, nous la retrouvons par exemple pour la décoration de Chevalier de l'ordre de la Couronne qui n'était pas une décoration belge. C'était une décoration de l'E.I.C. signée par Léopold et par van Eetvelde, secrétaire général de L'E.I.C.A l'époque 1900-1905, Paul recevait des ordres du chevalier ou baron de Cuvelier qui était Secrétaire de l'E.I.C. en Chine. C'est d'ailleurs un des sujets de mécontentement de Paul qui ne voulait pas que Ledent devienne Consul et qu'il devienne son chef. Il ne voulait recevoir d'ordre que de de Cuvelier. Splingaerd aurait préféré que ce soit Wittamer qui devienne consul et il essayait de l'attirer pour qu'il revienne en Chine. Il semble que le commandant n'était pas fort intéressé car il serait mal payé. Ce n'était pas le cas de Splingaerd qui était payé par l'E.I.C. pratiquement au même niveau qu'un ministre.
    En second lieu, le paragraphe mentionne le fait que Splingaerd n'a pas reçu d'audience près le roi. Celui-ci était difficile à voir car il était souvent absent. Le roi vivait avec sa jeune maîtresse qui lui avait donné deux enfants; il s'occupait principalement de la reprise de l'E.I.C. par la Belgique (ce qui le privera de ses revenus); il combinait des transferts de sa fortune afin de pouvoir déshériter au maximum ses filles et travaillait sur le service militaire obligatoire en Belgique. Il est mort trois ans plus tard comme le colonel Fivé. Le fait qu'il envisageait de transférer l'E.I.C. à l'Etat Belge fait que le roi arrêta toutes ses entreprises d'exploration (vers 1905-1906) tant en Afrique qu'en Chine, laissant à la Belgique le soin de continuer. Je l'ai déjà dit à un autre endroit: Splingaerd est arrivé trop tard avec ses projets.
  • Les personnes qui ont été intéressées par ce billet d’humeur sont invitées à me contacter si elles estiment avoir une autre opinion. Je vous invite également à lire le billet d’humeur suivant qui correspondra aux histoires de Madeleine et de sa famille.

    NB: les personnes qui le souhaitent peuvent me proposer la traduction (attention, c'est un texte littéraire) en anglais, en espagnol ou en chinois simplifié. Je la publierai volontiers, après contrôle pour faciliter la compréhension des personnes intéressées.

    People who were interested in this post mood are invited to contact me if they feel they have a different opinion. I also invite you to read the ticket that match the mood following the stories of Madeleine and her family.

    NB: those who wish can offer me the translation (note that it is a literary text) in English, Spanish and Simplified Chinese. I will publish freely, after controlling for facilitating the understanding of interested persons.

    Christian Goens

     

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